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20 novembre 2020

Apparu à l'origine dans The Georgia Straight du 13 novembre 2020

Le 7 novembre, la Dre Bonnie Henry, agente de santé provinciale de la Colombie-Britannique, a tenu une conférence de presse inhabituelle pour annoncer des restrictions plus strictes face aux infections croissantes au COVID-19. Mais, peut-être contre-intuitif pour certains, elle a insisté sur le fait que les nouvelles règles n'avaient pas besoin d'être accompagnées d'une application accrue.

Elle a raison.

La liste des recommandations non médicales pour freiner la propagation du COVID-19 est devenue un mantra quotidien. Restez dans votre bulle ou dans votre foyer immédiat lorsque les choses tournent mal. Éloignez-vous physiquement des autres. Portez un masque lorsque ce n'est pas possible.

La raison pour laquelle ce conseil continue de faire le tour est qu'il existe de plus en plus de preuves que ces actions ralentissent en fait la propagation du COVID-19.

Le seul outil de santé publique qui a été largement utilisé au Canada, sans aucune preuve de son efficacité? Amendes punitives. Beaucoup, beaucoup d'amendes.

Comme nous l'avons écrit dans notre rapport de juin, au cours des trois premiers mois de la pandémie, les gouvernements canadiens ont imposé plus de $13 millions d'amendes liées à la COVID. Et, comme plusieurs d'entre nous l'ont exposé dans un papier récent, il n'est pas du tout clair qu'il ait fait quoi que ce soit pour freiner la propagation du COVID-19.

La logique des amendes est simple : la dissuasion.

Les amendes, soutient-on, fonctionnent au niveau individuel : les amendes rendent les gens moins susceptibles de répéter le comportement qui a conduit à l'amende. Ils agissent aussi, théoriquement, au niveau de la population : le fait de savoir que d'autres sont condamnés à une amende incite les gens à éviter le même sort.

Plus l'amende est élevée, plus la dissuasion est grande, ou du moins c'est l'idée. Par conséquent, la récente vantardise du premier ministre Doug Ford selon laquelle les nouvelles amendes de l'Ontario seraient « le plus élevé du pays”.

Il y a deux problèmes avec cette logique. Premièrement, il n'y a aucune preuve convaincante pour étayer l'idée que les gens peuvent être condamnés à une amende pour se conformer. Deuxièmement, de nombreuses preuves montrent que les amendes punitives sapent les objectifs de santé publique et causent plus de tort que de bien, en particulier pour les populations marginalisées.

Avant que quelqu'un puisse changer son comportement, il doit être conscient que son comportement est interdit. C'est un problème, en général : la plupart des gens ne connaissent pas la loi. Mais le problème est particulièrement aigu en ce qui concerne COVID-19, où la frontière entre conseil et interdiction est floue, les ordonnances d'urgence sont complexes et les réglementations légales changent rapidement.

Comme nous l'avons écrit dans notre rapport de juin, la plupart des Canadiens que nous avons entendus n'ont reçu aucun avertissement et ne savaient pas qu'ils violaient les ordres d'urgence jusqu'à ce qu'ils reçoivent une contravention.

Mais même si les gens connaissent les règles, il n'est toujours pas clair que cette connaissance aura un impact sur le comportement. Comme indiqué dans notre récent rapport, les preuves de l'efficacité des amendes sont inégales et incohérentes. Bien qu'elles soient une sanction courante, les amendes sont peu étudiées. Le peu de recherches qui ont été faites ne sont pas concluantes : certaines études constatent qu'elles ont un effet dissuasif, d'autres n'en trouvent aucun, quelle que soit la taille de l'amende.

Et à notre connaissance, il n'y a jamais eu d'étude scientifique sur l'efficacité des amendes pour endiguer une maladie transmissible.

Cependant, les effets néfastes de l'utilisation de mesures d'exécution punitives sont bien documentés.

Il est bien établi que les pauvres, les Noirs et les Autochtones au Canada sont harcelés, condamnés à une amende, criminalisés et tués de manière disproportionnée par la police. Nous ne devrions pas nous attendre à ce que les modèles d'application entourant la COVID-19 soient différents. Ceux qui ont déjà du mal à payer leur loyer, à trouver un emploi ou à faire l'épicerie - des problèmes qui affectent de manière disproportionnée les communautés racialisées - sont doublement punis par des amendes.

Et à la lumière de nos efforts plus larges en matière de santé publique, il est clair que les amendes et les mesures d'application punitives sont susceptibles de saper une réponse de santé publique efficace plutôt que de la renforcer. Les efforts de santé publique tels que les tests, l'auto-isolement efficace et la recherche des contacts reposent fortement sur la coopération du public, la confiance dans le gouvernement et des soutiens ciblés. Les amendes punitives poussent les gens à cacher leur comportement passé imprudent plutôt que de divulguer afin que la santé publique puisse atténuer les dommages. Ils simplifient à l'excès un problème complexe et vont à l'encontre de la rhétorique du gouvernement sur l'unité, l'empathie et le soutien, sapant finalement les objectifs de santé publique.

Les efforts de santé publique doivent être axés sur des approches claires, fondées sur des preuves et équilibrées qui sont sensibles aux besoins des gens.

Si les gouvernements qui se concentrent sur les amendes et le maintien de l'ordre comme réponse veulent vraiment « suivre la science », alors le moment est venu de faire marche arrière. Les blitz de tickets et les amendes écrasantes, aussi simples et conceptuellement attrayantes soient-elles, sont beaucoup plus susceptibles d'exacerber la crise actuelle que de la résoudre.

Abby Deshman est directrice de la justice pénale à l'Association canadienne des libertés civiles.

À propos de l’association canadienne sur les libertés civiles

L’ACLC est un organisme indépendant à but non lucratif qui compte des sympathisant.e.s dans tout le pays. Fondé en 1964, c’est un organisme qui œuvre à l’échelle du Canada à la protection des droits et des libertés civiles de toute sa population.

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